Nous avons mis à l’épreuve cette Porsche 718 Cayman GT4 sur nos routes préférées tout comme lors d’une utilisation plus commune.
La Porsche Cayman a été présentée en 2005, en deux version, normale et S. Puis en 2010 une version plus affutée est venue coiffer la gamme avec la Cayman R. En 2015, au salon de l’automobile de Genève Porsche revient avec une version sportive de son reptile en adoptant cette fois une dénomination GT4 compatible avec celles utilisées pour la 911. On peut considérer celle-ci comme l’équivalent de la 911 GT3 dans la gamme à moteur central.
Cette GT4 de la génération 981 eut un succès commercial tel que toutes les commandes n’ont pu être honorées, la production devant être stoppée pour cause d’incompatibilité aux normes de pollution. Elle a eu le mérite de démontrer qu’une clientèle existe pour ce modèle.
Moteur
En 2016 passage au 4 cylindres à plat turbocompressé pour les 718 Cayman et 718 Cayman S. Elles récupèrent au passage la dénomination historique de la fin des années cinquante. Mais en Juin 2019 Porsche nous réserve une belle surprise en dévoilant la version actuelle de la GT4 motorisée par un flat-6 atmosphérique.
Porsche a développé un 4 litres atmosphérique délivrant 420 ch à 7600 tr/mn et un couple de 420 Nm entre 5000 et 6800 tr/mn. La zone rouge du compte-tour débute à 8000 tr/mn. Il est issu de la même famille que les versions turbo des 718 et 911 Carrera S actuelles. Il possède le même alésage de 102 mm et la même course de 81.5 mm que celui équipant les GT3 et GT3 RS. Il intègre les nouveaux injecteurs d’essence piezo de la Carrera S ainsi que les filtres à particules.
Châssis
Le châssis provient de la 911 GT3, de la génération 991.2 sortie en 2017. Le train arrière a été adapté à la configuration à moteur central. Les roues arrière directrices n’ont pas été retenues.
L’aérodynamique a été particulièrement soignée. Un diffuseur à l’arrière a été installé. Il fonctionne en conjonction avec le tout nouveau spoiler arrière et le fond de la voiture. Le résultat est une amélioration de 50% de l’appui aérodynamique sans augmentation de trainée. Le diffuseur est responsable pour le 30% de cette amélioration, le 20% restant provient du spoiler. Cette configuration délivre de l’appui sur toute la plage de vitesse.
L’aileron arrière est réglable entre 0 et 4 degrés d’inclinaison. Cette dernière valeur étant adaptée à une utilisation sur circuit. Lorsque l’angle d’attaque de l’aileron est augmenté, il faut également enlever sous l’avant de la voiture des volets ouvrant un passage d’air différent de manière à conserver l’équilibre aérodynamique. A l’avant devant les roues on trouve des sorties d’air destinées à apaiser les remous générés par les roues. Leur fonction est la même que les extracteurs sur les ailes des GT3 RS.
Un des challenges pour ce moteur est de remplir les normes de pollution actuelles. L’élément principal est une nouveauté chez Porsche, un système de coupure d’alimentation d’un banc de cylindre pour économiser le carburant. Ce système coupe un côté du flat 6 pendant 20 secondes, puis coupe l’autre banc, passant de l’un à l’autre de manière à garder les températures adéquates dans le catalyseur et le filtre à particules. Ce système est très souvent sollicité en conduite normale, il contribue grandement au résultat d’émission de CO2 et est compatible avec les normes en vigueur jusqu’en 2024-2025.
La transmission est identique au Cayman GT4 de la génération précédente. La boite à 6 vitesses a été reconduite. Les quelques critiques à l’époque concernant des rapports un peu trop longs devraient être gommées par le surcroit de couple. En automne 2020 la boite double-embrayage PDK à 7 rapports sera proposée en option. Les systèmes électroniques de contrôle de stabilité sont hérités des GT2 RS et GT3 RS. Le poids est légèrement supérieur au modèle remplacé d’environ 35 kg.
Conduite
Pour notre essai Porsche nous a fourni une Cayman GT4 Jaune Racing équipée comme il faut avec notamment les sièges baquets intégraux, le pack Clubsport, les freins céramiques et un intérieur soigné comprenant surpiqures et ceintures de sécurité jaune, ainsi que le pack carbone.
Dès la prise en main de la voiture nous prenons la direction de nos bases de test dans les alpes uranaises et bernoises. En arrivant à Wassen je monte dans la voiture et prends la direction du col du Susten. Dès la sortie du village et ses tunnels je me retrouve sur une belle ligne droite suivie de la première épingle à cheveux, l’occasion d’écouter les vocalises de ce flat-6.
Autant adresser le point tout de suite, la boite est beaucoup trop longue, le surcroit de couple par rapport à ses prédécesseurs est insuffisant pour masquer le fait qu’en 2ème on n’a pas le punch qu’on souhaiterait. Cet aspect péjore malheureusement l’expérience de conduite dans la situation particulière d’une route de montagne nécessitant de constantes relances.
Au lieu de constamment jouer du levier de vitesse on se retrouve soit en 2ème à des régimes très élevés ou en 3ème à des régimes trop bas. Dommage car le reste des interfaces, le levier de vitesse, l’embrayage sont parfaits en termes de tarage et de précision.
Je trouve toutefois la pédale de frein un peu trop haute par rapport à celle d’accélérateur pour pouvoir réaliser d’impeccables talon-pointes. La voiture palie à ça en proposant un coup de gaz automatique bien calibré dans les modes sport. On peut désactiver cette fonction à l’aide d’un bouton devant le levier de vitesse appelé « auto blip ».
En parlant des boutons de commande, on a la possibilité de déclencher le contrôle de stabilité ESC séparément du contrôle de traction TC. On peut déclencher l’ESC ou l’ESC et le TC. Ensuite on peut durcir l’amortissement piloté avec le bouton PASM et enfin enclencher le pot sport ou déclencher le start-stop automatique.
La tenue de route est diabolique, la direction parfaite, les enfilades sont un régal avec cette voiture à moteur central. L’inertie semble inexistante avec une direction qui communique le niveau d’adhérence du train avant. On peut vraiment rouler en confiance dès les premiers kilomètres. Le niveau d’adhérence des pneus Dunlop Sport MAXX Race 2 est difficile à mettre en défaut. J’ai constaté un léger « tramlining » en roulant sur autoroute, sans doute la conséquence d’un train avant réglé de manière un peu plus agressive que les modèles standards.
Pour garder un moteur atmosphérique remplissant les normes actuelles Porsche a dû faire appel à de nombreux artifices, et la question de savoir si cela se perçoit au volant occupe mes réflexions. Lorsqu’on roule tranquillement sur les rapports supérieurs il s’avère coupleux et extrêmement coopératif dans la circulation. Je n’ai pas perçu l’action du système de coupure des cylindres.
Lorsqu’on le pousse dans ses derniers retranchements, je l’ai trouvé un peu « paresseux » dans les régimes 3000-5000 tr/mn pour reprendre de la vigueur au-dessus. La bande son est envoutante, à l’ancienne je dirais, les hurlements de ce flat-6 près de la zone rouge du compte-tour sont un délice. Les flat-6 turbo actuels ne possèdent pas les harmoniques de ce 4 litres atmosphérique.
Les sièges baquets intégraux équipant notre voiture sont excellents. Le maintien est parfait tout comme le confort. Ils possèdent un réglage manuel pour le coulissement avant-arrière et un réglage de hauteur électrique. Le carbone de la structure du siège craque un peu lorsqu’on s’installe à bord, ce n’est pas le cas en roulant.
On peut envisager des longs trajets sans souci avec ces baquets. Je serais un peu moins catégorique en cas d’utilisation quotidienne, les entrées-sortie de la voiture vont finir par user le cuir sur le rebord des bourrelets et l’opération n’est pas toujours aisée si on ne peut pas ouvrir largement la porte.
La seule contrainte véritable dans la circulation de tous les jours vient de la lame avant très prononcée, qui, conjuguée avec le rabaissement de la voiture, demande de l’attention pour éviter de toucher. Sinon, moteur, boite, la voiture est très docile pour une utilisation de tous les jours. Nous avons consommé lors de notre semaine de test 12.63 l/100 km.
Conclusion
La GT4 constitue actuellement le haut de la gamme Cayman. Elle est résolument tournée vers les amateurs de voitures radicales, à la recherche du plaisir de conduite sur route et sur circuit. Ceux qui délaissent ces derniers se tourneront plutôt vers la Cayman GTS qui offre pratiquement la même expérience mais avec un tarage global un peu moins extrême.Le prix de vente en Suisse est de CHF 122’900 (€100’357) soit CHF 18’800 (€15’124) de plus que la version GTS possédant le même moteur certes dans une configuration moins puissante de 20 ch. On peut aussi considérer dans l’autre sens, cette GT4 est au moins CHF 86’900 (€73’205) moins chère que la 911 GT3. Elle reste une sportive extrêmement intéressante à conduire avec peu ou pas de concurrence. A mes yeux elle n’a qu’un seul défaut, la longueur des rapports de boite qui peut être gommé en adoptant le modèle à double-embrayage PDK.